Quand les trans vont chez le médecin...

Nous avons contribué au livret de la LGP 2008, paru à 15.000 exemplaires, en écrivant l'article suivant.
L'intégralité du livret est disponible sur le site de la LGP de Lyon.

Les personnes transgenres ou transsexuelles sont fréquemment confrontées à des difficultés dans leur rapport avec le corps médical. La plupart des médecins sont incapables de répondre à nos problèmes de santé, d’autres refusent de nous recevoir.

Par manque de connaissance, certains médecins n’accepteront pas de nous traiter : des orthophonistes pensent à tort que les oestrogènes féminisent la voix et refuseront de suivre une MtF (femme transsexuelle) non hormonée ; d’autres avanceront le fait de ne pas avoir été formés aux traitements spécifiques à la transition (parcours fait par une personne trans). Ils ne sont pas toujours en mesure de nous aider ou bien ils prescrivent des traitements contre-productifs par exemple des anti-androgènes pour des FtM (homme transsexuel).De plus, en raison des préjugés, il nous est souvent difficile d’être suivis par un gynécologue ou un andrologue. Le médecin refusera de nous examiner par principe, au motif que les chirurgiens qui nous ont opéré sont les seuls qui devraient s’occuper de nous ou que notre présence pourrait déranger les autres patients. A cause des contraintes de la procédure de changement d’Etat Civil qui conditionne le 1 et le 2 du numéro de sécurité sociale, notre accès aux soins médicaux les plus simples peut devenir un véritable parcours du combattant ; même lorsque nous souhaitons consulter hors du cadre de notre transition, nous tombons souvent sur des médecins méprisants.

A cause de notre numéro de SS, nous sommes sans cesse réassignés/ées à la pseudo naturalité de notre identité. Il est tout à fait inacceptable qu’il soit obligatoire en France que seules les personnes ayant été stérilisées chirurgicalement puissent avoir ce droit de voir leur vie privée enfin respectée. L’accès au traitement hormonal est conditionné par l’accord d’un psychiatre. Certains s’évertueront à vouloir guérir leur patient qui doit accepter le corps que la nature (Dieu ?) lui a donné : n’oublions pas que nous sommes toujours considérés comme des malades mentaux par l’OMS. D’autres donneront leur accord à condition que le patient respecte des conditions arbitraires : hétérosexualité dans le sexe de destination, volonté d’effectuer une chirurgie de réassignation sexuelle... alors que rares sont les personnes trans qui correspondent à ces stéréotypes.

Des médecins se présentant comme des ‘spécialistes’ du « transsexualisme » qui forment des équipes multidisciplinaires pseudo officiels et imposent des protocoles contraignants s’inspirent de ces critères. Leurs critères excluent bien entendu de nombreux trans qui se retrouvent en grande détresse morale, d’autant qu’il leur est souvent tenu des propos insoutenables : (un endocrinologue) « Je pourrai vous prescrire des hormones maintenant. Ce serait facile. Mais vous vous êtes marié et avez un enfant. Donc assumez », ou bien (un psychologue à une personne disant qu’elle risque de ‘faire une bêtise’ si elle ne peut pas avoir d’hormones) « nous nous sentons responsables lorsqu’une personne à qui nous avons permis d’effectuer une transition se suicide. En revanche, quand il s’agit de quelqu’un qui n’entrait pas dans le protocole, ce n’est pas notre problème. ».

En juin 2005 ActUp a osé dénoncer publiquement via un tract le discours d’une psychiatre partisane de ce type de discours. Le président de l’association a été condamné en appel à 5000€ de dommages et intérêts pour diffamation et verra cette condamnation portée à son casier judiciaire.

Il reste toutefois possible de faire une transition en dehors de ces pseudo ‘équipes officielles’. On peut trouver un psychiatre et un endocrinologue sans idées préconçues afin de commencer notre parcours. Créer sa propre équipe soignante, c’est aussi choisir ses interlocuteurs et quelque part choisir sa vie.