Nos revendications
I) Changement d'état-civil
1) Arrêter l'exigence de stérilisation, de prise de traitement hormonal ou d'opérations chirurgicales préalablement au changement d'état-civil
Ces exigences ont des conséquences dramatiques sur la vie de nombreuses personnes trans. Elles ont trop souvent pour conséquence d'empêcher des personnes trans de pouvoir trouver un emploi car le changement de leurs papiers est impossible lorsqu'elles ne veulent pas se plier à ces exigences.
2) Cesser les expertises
Ces expertises coûtent plusieurs centaines voire milliers d'euros aux personnes trans. Elles sont fondées sur des critères sexistes, comme vérifier qu'un homme trans ne s'épile pas, et constituent une violation de l'intimité des personnes, comme lors d'examens gynécologiques non désirés pour les femmes trans.
3) Reconnaître le changement d'état-civil des binationaux
Les personnes ayant une double nationalité et ayant déjà changé d'état-civil dans un autre pays n'ont pas leur identité reconnue par l'Etat français. Elles doivent actuellement refaire intégralement une procédure de changement d'état-civil.
L'Etat français doit reconnaître un changement d'identité effectué à l'étranger par une personne disposant d'une double nationalité.
4) Instaurer le changement d'état-civil selon une procédure administrative en mairie
Les procédures actuelles sont effectuées au tribunal de grande instance. Elles nécessitent le recours à un avocat, l'apport de nombreux témoignages, photos, certificats médicaux. Cette procédure coûte plusieurs milliers d'euros et peut durer plusieurs années pendant lesquelles les personnes continuent de subir les discriminations liées à l'incohérence de leurs papiers.
Le changement d'état-civil doit être facilité par une démarche administrative simple, rapide et gratuite, sans conditions médicales.
5) Arrêter l'exigence de divorce
L'exigence préalable de divorce d'une personne pour qu'elle puisse bénéficier d'un état-civil constitue une intrusion inacceptable dans sa vie privée.
II) Recours au système de santé
6) Respecter la liberté de choisir ses médecins
L'article R4127-6 du code de la santé publique déclarant la liberté d'une personne à choisir librement son médecin doit être respecté. Il est anormal que de nombreux médecins refusent de recevoir en rendez-vous une personne au seul motif qu'elle est trans, et ce avant même de connaître le motif du rendez-vous. Il n'est pas non plus question de créer des centres qui seraient spécialisés dans l'accueil des personnes trans.
7) Se désolidariser des critères discriminatoires actuellement utilisés par certains médecins
Certains médecins se définissant spécialistes du "transsexualisme" utilisent des critères sexistes et homophobes pour déterminer si une personne est trans ou non. Ainsi, ils considèreront par exemple qu'une femme trans doit se maquiller, porter des jupes, être attirée sexuellement par les hommes. Ces critères, utilisés lors de protocoles arbitraires et dénoncés depuis des années par de nombreuses associations, ont un effet dévastateur sur de nombreuses personnes trans qui se voient ainsi jugées comme n'étant pas trans et ne prennent pas en compte la variété des identités de genre.
8) Respecter le droit à l'autodétermination
Seul un individu est à même de déterminer son genre. Ce n'est pas à un médecin de juger si un individu a le droit ou non d'effectuer sa transition. Le rôle du médecin doit se limiter à informer l'usager sur les conséquences d'une prise d'hormones ou de certaines opérations.
9) Retirer le 'transsexualisme' de la classification en trouble mental
Cette classification est établie par l'Organisation Mondiale de la Santé via la Classification Internationale des Maladies, mais chaque Etat à toute latitude d'apporter des modifications dans cette classification.
Ce retrait n'est pas de nature à empêcher le remboursement des frais, car il existe chaque fois des alternatives de codification pour chaque intervention.
10) Maintenir les remboursements
L'Organisation Mondiale de la Santé définit la santé comme étant
"un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité". Retirer le "transsexualisme" des maladies ne change donc en rien la légitimité à maintenir le remboursement des recours au système de santé par les personnes trans.
11) Rembourser les opérations effectuées hors de l'Union Européenne
Certaines opérations sont particulièrement mal maîtrisées par les chirurgiens français (vaginoplastie, phalloplastie, métaoïdioplastie), contrairement à d'autres pays considérablement plus en avance.
Des opérations de qualité ne doivent pas être réservées aux seules personnes disposant de larges moyens financiers mais être accessibles à tou-te-s, dans la mesure où l'état actuel des pratiques françaises ne permet ni des opérations satisfaisantes, ni des délais d'intervention suffisamment courts.
12) Mettre en place des études sur la santé des trans
Des études doivent être menées sur les effets à long terme des traitements médicamenteux pris par les personnes trans afin de pouvoir leur proposer des solutions adaptées à leurs besoins.
Des études doivent également être menées sur l'interaction de ces traitements avec d'autres molécules, notamment celles des antirétroviraux afin que les personnes trans séropositives puissent concilier traitement du VIH et prise d'hormones.
13) Permettre le recours à la conservation des gamètes
Les comités d'éthique des Centres d'Etude et de Conservation des Oeufs et du Sperme humains refusent actuellement la conservation de gamètes de personnes trans préalablement à leur prise de traitement hormonal. Cette posture prive donc toute personne trans se faisant stériliser de la possibilité de procréer un jour. Pourtant, une des missions de ces centres est explicitement de conserver les gamètes des personnes débutant un traitement stérilisant.
III) Droits des personnes trans
14) Ajouter l'identité de genre à la liste des 18 motifs de discriminations interdits par la loi
La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité a considéré que toute discrimination à l'encontre d'une personne trans équivalait à une discrimination fondée sur le sexe. Cependant, cela n'est pas toujours vrai, la transphobie comporte des spécificités propres qu'il faut prendre en compte.
15) Former les fonctionnaires à l'accueil de publics trans
Les personnes transidentitaires sont souvent confrontées à du mépris, des moqueries ou des refus de services y compris dans les services publics. Il convient donc de sensibiliser les fonctionnaires à l'accueil de publics trans.
16) Eduquer les plus jeunes au respect des différences
L'identité de genre a été introduite en 2010 dans le programme des lycées. Cette initiative permet d'amorcer l'éducation des jeunes sur l'existence des personnes trans et leur légitimité à exister. Toutefois, il faudrait introduire dès l'école primaire cette éducation à la différence.
17) Aménager les conditions de détention des personnes trans
Les femmes trans sans changement d'état-civil sont incarcérées en prison pour hommes, malgré tous les risques que cela représente pour leur sécurité et leur intégrité physique. Leurs traitements hormonaux leur sont souvent retirés, malgré le risque que cela représente pour leur santé, elles sont souvent l'objet de maltraitances extrêmes de la part des autres détenus ainsi que du personnel pénitencier. Une circulaire de juillet 2010 du Garde des Sceaux a appelé les directeurs de prisons à se sensibiliser sur les conditions de détention. Pourtant, la situation n'a que peu avancé depuis. Un groupe de travail doit être constitué sur cette question.
18) Mettre en place une politique publique de lutte contre la transphobie
De façon générale, les associations ont peu de moyens pour mettre en oeuvre des actions durables de lutte contre la transphobie. Les collectivités locales doivent s'engager en considérant les personnes trans comme un public prioritaire, soutenir les initiatives des associations et lancer des campagnes de sensibilisation.
19) Respecter le droit d'asile des personnes trans
En avril 2011 le Parlement Européen a ajouté l'identité de genre aux critères permettant à une personne de demander l'asile. La France doit prendre en compte ce critère lors des demandes d'asile des personnes trans.
20) Appliquer les recommandations du Conseil de l'Europe
Le commissaire aux Droits de l'Homme du Conseil de l'Europe a établi une liste de recommandations à suivre pour les états membres, dont fait partie la France, afin que soient respectés la dignité et les droits fondamentaux des personnes trans. La France se doit de les appliquer sans délai.
Les points 1, 5, 10, 14, 18 et 20 des présentes revendications figurent d'ailleurs dans les recommandations du commissaire aux Droits de l'Homme.
Lire le rapport 'Droits de l'Homme et identité de genre'